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XXVI
INTRODUCTION

gneur, qui osera affronter ton jugement ? » C’est à ce cri de nos misérables âmes que répond surtout la Légende Dorée, par la voix de ses confesseurs et par l’exemple de ses pécheresses, nous apportant le témoignage de treize siècles de christianisme, dont elle est, sinon une histoire toujours bien exacte, à coup sûr le testament le plus authentique. Elle nous apprend que la justice de Dieu n’est toute faite que de sa bonté. « Ne craignez pas trop, nous dit-elle, que le Seigneur vous tienne compte de vos iniquités ! Lui-même, suivant l’expression de saint Bernard, est prêt à vous faire bénéficier du surplus de ses mérites ; et puis il y a, auprès de lui, la Vierge et tous les saints, qui ne cessent point de le solliciter en votre faveur. Mais il ne vous pardonnera qu’à la condition que vous l’aimiez, dans la personne du pauvre et du malade, de la veuve et de l’orphelin, de tous ceux que la souffrance élève jusqu’à lui ; à la condition que vous restiez humbles d’esprit et de cœur, vous gardant avec soin des fruits amers de l’arbre de la science, dont le diable vous affirme qu’ils pourront vous rendre pareils à des dieux ; et à la condition, enfin, que vous honoriez le Seigneur dans la nature, son œuvre, au lieu de mépriser et de détruire celle-ci comme vous vous acharnez à le faire. Habituez-vous plutôt à écouter les leçons des forêts que celles des livres ! Obtenez des moineaux qu’ils consentent à venir manger dans vos mains ! Et, quand vous verrez un ours ou un loup pris au piège, hâtez-vous de courir à lui pour le délivrer ! Renoncez à vous-mêmes pour vivre tout entiers dans le reste du