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SAINT VINCENT


XXV


SAINT VINCENT, MARTYR
(22 janvier)


Le martyre de saint Vincent a été raconté, dit-on, par saint Augustin. Prudence l’a chanté en des vers magnifiques.

I. Vincent, noble de race, mais plus noble encore de foi et de piété, était diacre du saint évêque Valère ; et comme il avait plus d’éloquence que le vieil évêque, celui-ci lui avait confié le soin de prêcher à sa place, afin de pouvoir mieux se livrer, lui-même, à la prière et à la contemplation. Or, sur l’ordre du gouverneur Dacien, tous deux furent conduits à Valence et jetés en prison. Le gouverneur les y laissa longtemps sans nourriture ; puis, quand il les crut presque morts de faim, il les fit amener devant lui. Et, en voyant qu’ils étaient pleins de santé et de joie, il devint furieux et s’écria : « Comment, oses-tu, Valère, sous prétexte de religion, résister aux décrets de tes princes ? » Saint Valère se mit en devoir de répondre, avec sa douceur habituelle ; mais Vincent lui dit : « Père vénéré, ce n’est pas le moment de murmurer d’une voix faible, comme si l’on avait peur, mais de parler haut et librement ! Si donc tu veux me l’ordonner, mon père, je répondrai pour toi à ce juge ! » Et Valère : « Fils bien-aimé, depuis longtemps déjà je t’ai confié le soin de parler à ma place. Je te charge à présent de répondre au nom de la foi que nous défendons. » Alors Vincent, se tournant vers Dacien : « Sache, lui dit-il, toi qui nous accuses, que pour nous, chrétiens, c’est un blasphème affreux de renier notre foi ! » Dacien, de plus en plus irrité, envoya le vieil évêque en exil ; et, tant pour punir le jeune diacre de son audace que pour effrayer par son exemple les autres chrétiens, il fit étendre Vincent sur un chevalet, et ordonna qu’on lui rompît les membres. Et