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SAINT MACAIRE

XIX


SAINT MACAIRE, ERMITE
(15 janvier)


Macaire, étant abbé, et marchant dans le désert, entra pour dormir dans un monument où étaient ensevelis des corps de païens ; et il plaça un de ces corps sous sa tête, en guise d’oreiller. Et les démons, voulant l’effrayer, appelaient, disant : « Lève-toi et viens avec nous au bain ! » Et un autre démon, s’étant introduit dans le corps du mort, et prenant une voix de femme, répondait : « Je ne puis me lever, car un étranger s’est mis sur moi ! » Mais Macaire, sans s’effrayer, dit au corps, après l’avoir battu : « Lève-toi et va-t’en, si tu le peux ! » Ce qu’entendant, les démons s’enfuirent, en criant à haute voix : « Seigneur, tu nous as vaincus ! »

Un jour, saint Macaire, traversant un marais pour regagner sa cellule, rencontra le diable, qui, armé d’une faux, voulut le frapper et ne put y parvenir. Et le démon lui dit : « J’ai beaucoup à souffrir de ton fait, Macaire, et cela, parce que je ne parviens pas à te vaincre. Je fais pourtant tout ce que tu fais ; tu jeûnes et moi je ne mange pas, tu veilles et moi je ne dors pas ; et il n’y a qu’une seule chose où tu me dépasses. » Et l’abbé dit : « Quelle est donc cette chose ? » Et le diable : « C’est ton humilité, en raison de laquelle je suis sans force contre toi ! »

Ayant trop à souffrir de la tentation, Macaire, mit sur ses épaules un grand sac rempli de sable, et alla le porter dans le désert, plusieurs jours de suite. Théosèbe, le rencontrant, lui dit : « Abbé, pourquoi portes-tu ce fardeau ? » Et il lui répondit : « Pour tourmenter mon corps qui me tourmente ! » Une autre fois, il vit Satan vêtu d’un manteau percé de trous et auquel pendaient d’innombrables flacons. Et Macaire lui dit : « Où vas-tu ? » Et lui : « Je porte à boire aux frères ! »