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un plaisir énervé à leur compagnie. Auprès d’eux elle se sentait dans un monde neuf où toute chose avait une saveur forte. Elle ne trouvait plus Léonora déclamatoire ; l’inquiétude sourde que lui causait l’énigmatique personnalité d’Hansen s’affaiblissait. Ces gens singuliers devaient détenir le secret d’un bonheur plus vif. Désireuse de vaincre les méfiances qu’elle leur apercevait, elle n’avait songé qu’à leur plaire et s’y était employée de tout son art, qui était grand. Ce jour-là, pendant la représentation de Parsifal, elle avait eu la soudaine notion de la fin de quelque chose. Les amis à demi séduits allaient partir, elle resterait seule, le cœur inoccupé et plus ardent. Elle avait eu pitié d’elle-même. En entendant la pathétique Kundry dire son brûlant désir de servir, elle avait tout à coup compris qu’elle n’était plus l’inconsciente venue à Bayreuth pour y prendre un divertissement et, toute pleine de détresse et d’enthousiasme alternés, elle s’était laissé ravager par le voluptueux mysticisme de Parsifal jusqu’à en souffrir, mais de façon délicieuse. Et tandis que le vénéneux et savant baiser de la magicienne enseignait le devoir au pur enfant, elle avait reconnu que le départ d’Erik et de Léonora ne devait pas la tant désoler, ils la laissaient fortifiée pour l’accomplissement de son véritable destin : la conquête de l’âme mystérieuse d’André. C’était vers cela qu’elle allait, sans le savoir, tandis qu’elle écoutait ses amis d’un cœur si fervent. Elle cessa de penser à eux pour ne plus penser qu’à André. Saurait-elle lui faire comprendre et partager ce souhait d’union parfaite et d’entente profonde ? Une fatigue peureuse l’envahit