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essayait de tenir ailleurs, revenaient sans cesse sur André pour s’en détourner aussitôt. Elle hésita encore ; puis, la parole froide d’abord et s’animant peu à peu jusqu’à l’accent de la brutalité :

— Eh bien, puisque vous y tenez… dit-elle. Si je vous offense, vous vous souviendrez de m’avoir contrainte. Je pense que vous êtes de ceux qui ont ensemble l’égoïsme, sûr de ses droits, indifférent à la souffrance qu’il cause, — quand il n’en tire pas le meilleur de sa joie, — et le goût maniaque de plaire, ce besoin de séduire n’importe qui, même les êtres dont on se soucie le moins, pour rien, pour l’amusement… Vous devez avoir un redoutable art de mentir : à la manière des hommes, pour être le plus fort, à la manière des femmes, pour se défendre. Vous êtes de la race des pervers, dangereux entre tous, parce qu’ils cultivent leur perversité comme une supériorité mentale et qu’ils savent tromper leur conscience par l’insoucieuse gaieté qu’ils mettent à troubler et à trahir…

— Léo ! interrompit Jacqueline d’un accent vif de reproche et d’inquiétude.

Mademoiselle Barozzi tourna vers elle ses yeux violents.

— Oui… pourquoi me force-t-on à dire ces choses ?… Excuse-moi… Tu as eu tort de m’inviter… Je te l’avais dit ! Je suis mal faite pour la gentillesse des déjeuners sous les arbres.

Elle se leva, jetant sa serviette.

— Où vas-tu ? dit Jacqueline avec un geste hésitant pour la retenir.

— Aiļleurs !