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Marken se leva et se mit à marcher devant elle en parlant.

— Vous savez que j’ai renvoyé ma femme. J’étais depuis longtemps au courant de ses aventures, qui m’étaient fort indifférentes, vous l’imaginez ; mais j’attendais le moment utile pour me débarrasser d’elle. Quand le besoin d’être complètement libre est venu, je lui ai montré le paquet de lettres qui prouvaient ses fantaisies et que j’avais depuis six mois dans un tiroir, et je l’ai sans phrases conduite au train de Rome. Je me suis battu avec son amant, parce que cela m’a paru convenable ; puis j’ai une fois pour toutes rayé cet épisode de ma vie. Vous n’avez pas su cette rencontre, je m’étais arrangé pour que les journaux n’en parlassent point ; il me déplaisait que vous l’apprissiez indirectement. Cela réglé, je me suis occupé d’une autre affaire, plus importante. Mes renseignements, qui, vont d’un bout de l’Europe à l’autre, m’avaient fait pressentir un grand mouvement de Bourse. J’ai joué, sans un centime de capital, des sommes énormes. Je me trouvais un droit absolu à faire ainsi, car, si mes calculs s’étaient trouvés faux, je me serais tué. Le succès valait l’enjeu de la vie, et cet enjeu-là justifiait l’importance du risque. Comme j’ai pensé à vous pendant les heures tragiques où mon sort oscillait ! Je ne m’étais pas trompé ; à la dernière liquidation, j’ai réalisé deux millions. Excusez-moi de vous parler de ces choses. Avant-hier, dans l’après-midi, j’ai payé toutes mes dettes dont, depuis douze ans, j’avais la liste toujours grossissante dans mon portefeuille… Elle ne me quittait jamais ; chaque fois que je prenais une carte ou un billet de banque, ce