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— Ah ! non !… pas d’apologie de l’anarchie !

— C’est trop bête !

— Des bandits, en somme. Rien d’autre !

— Pas celui dont je viens de vous parler, en tout cas, dit Marken, d’un accent fort. J’ai eu occasion de le voir assez souvent dans les derniers mois de sa vie ; c’était l’âme la plus haute et la plus noble ; il avait une grande culture et une douceur exquise, la pensée la plus lucide et une ardeur de dévouement, une tendresse incomparables… Au moyen âge, on canonisait des personnages mystiques qui ressemblaient beaucoup à cet anarchiste-là.

— Moi aussi, je l’ai connu, articula résolument Jacqueline. Tout ce que vous avez dit est exact et on en pourrait dire plus encore. C’était un être admirable.

— Comment, ma chère, est-ce possible !… Mais quelle horreur !… Vous avez des relations avec des individus pareils ! Au moins leur recommandez-vous de ne pas mettre des bombes chez vos amis ?

— Comment avez-vous su qu’il était mort ? demanda Jacqueline à Marken pendant que le général de Troisbras proposait des moyens militaires et définitifs de venir à bout de cette racaille.

— C’est mon goût de tout savoir, répondit Étienne ; et il m’intéressait si particulièrement !… Je l’avais connu autrefois à l’étranger, puis perdu de vue ; je l’ai retrouvé à Bayreuth, l’année où… et, depuis ce temps-là, j’ai suivi de loin sa vie… Il avait pour moi une haine singulière, qui a cessé dans les dernières semaines. Il a compris qu’entre nous il y avait la similitude d’une souffrance pareille. Je savais qu’il