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— Oui… oui… jusqu’à un certain point. Alors elle s’en va ?

— Ça vous fait de la peine ?

— Pas la moindre. Au reste, puisqu’elle a trouvé bon de vous mettre au courant de cette sotte histoire, vous m’autoriserez à m’en expliquer avec vous. Je tiens beaucoup à ce que l’opinion que vous avez de moi soit, non pas bonne — ce serait de la mégalomanie, — mais juste. Je vous dirai donc, pour commencer, que je ne suis pas du tout épris de votre amie.

– Pourquoi vous en défendre ? Vous en avez aimé de moins belles !

— Certainement. Mais jamais d’aussi ridicules. Cette fille m’a, dès notre première rencontre, donné sur les nerfs d’une façon prodigieuse par ces manières qu’elle a de regarder l’humanité du haut d’on ne sait quoi où elle se croit perchée. Ce qu’elle m’agaçait en vous faisant la leçon à tout propos… Alors, — évidemment, ce n’était pas bien généreux, — j’ai eu envie de la ramener un peu sur le sol où sont les pauvres gens qu’elle méprise tant. Il m’a paru intéressant de lui donner, à elle aussi, une bonne leçon et de lui montrer que ses grands airs, son détachement, ce n’étaient en somme que des bravades de poltronne et que, si elle était si sévère aux passions du pauvre monde, c’est que ses passions, à elle, n’étaient point satisfaites. J’étais persuadé qu’elle était moins capable qu’aucune autre de résister à la plus banale des cours… je lui ai fait la cour. J’ai parlé de sacrifice, irrité un peu sa jalousie ; ça a suffi ; au premier mot équivoque, elle a perdu la tête. Tout cela