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Elle alla vers la toilette, se baigna la figure d’eau brûlante, puis, assise devant un miroir, elle chercha, parmi les petits ustensiles d’écaille et d’or, les maquillages dont elle avivait son teint lorsqu’elle se poudrait pour un bal costumé. Le rouge aux pommettes et au dessus des yeux, un peu de noir à ses sourcils aigus, du rouge encore à sa bouche, lui refirent un masque de fête ; ses yeux seuls gardaient l’éclat exagéré des larmes récentes. La femme de chambre rentra. La respiration un peu haletante de Jacqueline se calmait ; elle passa la robe couverte de paillettes, serra son cou dans un carcan de corail rose et de diamants. Les scintillements de la robe et des pierreries amortissaient la lueur fébrile de ses prunelles. En se vaporisant, elle se regarda dans la glace, avec un pli de tristesse aux lèvres. Quel symbole précis que cette toilette, ces fards, ces bijoux, la hâte de partir pour retrouver le monde avec ce cœur pesant et ces affreuses images de découragement et de mort ! Il faudrait causer, sourire… Il lui sembla que jamais plus elle ne pourrait sourire.

Elle mit son manteau, ses gants, et rejoignit André qui l’attendait dans le salon.

— Nous sommes terriblement en retard, dit-il ; quelle musique va faire madame d’Audichamp ! Elle tient tant à ce qu’on soit à table à huit heures ! Qu’est-il arrivé ? On m’a dit que mademoiselle Barozzi était avec vous ?

— Oui, c’est elle qui m’a retenue, répondit Jacqueline.

Et, comme elle passait sous la lumière violente d’une lampe, M. des Moustiers observa :