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lutter ? Accepter le destin, le vouloir, c’est peut-être plus digne ; en tout cas, c’est plus raisonnable que de le subir en se défendant.

Léonora avait les yeux pleins de larmes ; la tristesse infinie, la douceur lasse de son visage blanc lui faisaient une beauté nouvelle et poignante. Elle dit lentement :

— Et toi aussi, tu aimes… et on t’aime. Qui pourrait ne pas t’aimer ?

Elles s’étreignirent en silence ; toutes deux pleuraient, puis Léonora se dégagea et, sans une autre parole, sortit de la pièce.

Jacqueline se jeta sur sa chaise longue et, comme le soir où son amie l’avait laissée seule avec son angoisse, elle sanglota, la face cachée dans un coussin. Mais ce n’était plus la douleur peureuse, les nerfs surmenés qui se satisfaisaient ainsi ; ses larmes emportaient les ressentiments et les colères ; le pardon montait en elle, très tendre ; elle plaignait ces deux êtres qui venaient de sortir de son existence, et en leur pardonnant de n’avoir rien pu pour elle, elle s’absolvait de n’avoir rien pu pour eux.

On frappa à la porte. Redressée d’un geste vif, elle alla à la fenêtre, feignit de regarder dans la rue et, d’une voix encore incertaine, cria :

— Entrez.

— Monsieur fait demander si madame sera bientôt prête ?

— Quelle heure est-il ?

— Sept heures trente-cinq.

— Dites à monsieur que je n’en ai plus que pour vingt minutes et revenez m’habiller.