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quoi, elle ne savait plus ; son mari, qu’elle apercevait de loin causer et rire, avait été pendant des mois le principe de sa joie, et de cela aussi elle ne pouvait plus comprendre la raison ; et cet autre, qu’elle voyait la regardant impérieusement, il l’avait tenue dans ses bras, il l’aimait aujourd’hui, l’aimerait-il demain ? Non sans doute, puisque tout s’efface. Elle voulut savoir que non, qu’il est des choses durables, qu’Erik se souvenait, lui ; elle dit :

— Vous êtes content de me revoir ?

— Je ne pensais pas que cela dût jamais plus arriver.

— Est-il possible que vous ayez gardé la mémoire de moi, pareille pendant tout ce temps, et… votre promesse ?

– Oui, dit-il d’un tel accent qu’elle sut que c’était vrai.

Alors, cette désireuse de tous les cœurs éprouva une angoisse à l’idée de ne pas jouir encore de celui-ci ; elle eut un regard merveilleusement tendre.

— Il faut nous revoir, causer… Je crains que vous ne soyez irrité contre moi.

— Non… Pourquoi ? Je savais.

— Vous ne savez rien ! Où pourrons-nous nous rencontrer ?

Il hésita. Il était extrêmement pâle, non d’une fugitive pâleur d’émotion, mais de cette lividité fixe qui colle au masque des mourants. Elle craignit de le voir tomber, terrassé par le mal mystérieux qui semblait travailler en lui.

— Vous souffrez ; voulez-vous vous asseoir ? demanda-t-elle.