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tu avais une si belle voix ! Est-ce curieux que jamais je n’aie vu ton nom dans un journal de musique !

— Je ne chante pas, je racle du violon… et c’est tout simple que tu n’aies pas reconnu mon nom d’artiste, puisque tu l’ignores. Sur les programmes je m’appelle Marthe Helding.

— Comment, c’est toi, Marthe Helding ! Mais, chérie, tu es horriblement célèbre, alors ! s’écria Jacqueline d’un accent très tendre. Je connais des tas de gens qui sont fanatiques de ton talent… Je savais bien que tu étais de la race des grands artistes, et ça me fait plaisir, ah ! tant de plaisir que tu réussisses… Mais pourquoi n’avoir pas gardé le nom de ta mère ? Il me semble que ça t’aurait servi, au début…

— J’ai préféré me tirer d’affaire sans être aidée par rien… Tu es donc seule ici… Ton mari ?

– Je l’ai envoyé au bas du parc avec madame Simpson… Tu comprends, je voulais que nous pussions causer tranquillement.

— Qu’est-ce que c’est que cette madame Simpson qui a un nom anglais et parle l’argot comme si elle n’était jamais sortie de Paris ?… Elle m’a bien déplu hier soir, pendant les cinq minutes que je suis restée à votre table… presque autant que je lui déplaisais, et ce n’est pas un peu !

— Son père et son mari étaient Anglais, sa mère, Française ; elle a été élevée en France… Elle est veuve, riche, elle voyage beaucoup. Je l’ai connue à Luchon, et, comme elle a passé les deux derniers hivers à Paris, nous nous sommes liées. Elle est intelligente… ou plutôt elle a de la drôlerie dans l’esprit, un sens amusant de la caricature ; c’est une excellente musi-