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bras en l’air, elle remettait sa coiffure en ordre, elle eut la vision du domestique qui balayait cette pièce chaque matin, et retrouvait sur le tapis les peignes qui s’échappent des chignons bousculés, dans le désarroi des heures amoureuses, et qu’on oublie de chercher en s’en allant.

Lorsqu’elle se : tourna vers Étienne, son visage rétabli comme sa coiffure avait beaucoup de douceur et d’assurance.

– Cher ami, comme je vous remercie de me si bien comprendre ! En me cédant, comme vous venez de faire, vous m’avez persuadée de votre tendresse dont je doutais encore… Jamais je n’aurais deviné qu’on pût avoir tant de fierté d’être reconnaissante.

Il se jeta sur le canapé.

— Quelle femme êtes-vous donc, dit-il, pour faire de moi ce misérable jouet de vos caprices !… Je ne peux pas m’arracher de vous… J’ai si peur de vous perdre !… Mais de quoi êtes-vous faite pour garder ce calme ?… Votre regard, vos gestes, votre tristesse, surtout, expriment un tel pouvoir de passion… Mais vous ne m’aimez pas, voilà, c’est simple.

Elle revint s’asseoir auprès de lui et prit sa main.

— Je ne vous aimais pas lorsque nous sommes entrés ici, dit-elle. J’avais le goût de votre intelligence et la curiosité de vous, rien de plus. Mais vous m’avez fait, en vous dominant, le plus magnifique hommage, et cela m’a liée à vous. Je ne vous aime pas comme vous souhaiteriez, mais je vous aime, cher, d’une singulière tendresse, comme on aime l’être qui réalise le rêve qu’on avait. Sentez-vous qu’il y a entre nous quelque chose que rien ne peut briser ?