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bien, mais enfin… Je vous admire à cause de la puissance que je sens en vous, puissance sur autrui et sur vous-même : me suis-je trompée ? N’avez-vous de volonté que pour votre plaisir ?… Si c’est ainsi, vous avez raison, il faut nous séparer, mais si c’est autrement… Ne repoussez pas ma tendresse, qui vous fera plus fort, croyez-moi… Dites, mon ami cher, ne voulez-vous pas que ce soit ainsi ?

— Vous voulez bien m’admettre dans votre troupeau ? Je le comprends et j’en suis flatté. Mais je ne suis pas une bête de troupeau… Vous ne m’aimerez jamais, je l’ai senti tout à l’heure à ce mouvement de répulsion qui venait des profondeurs de vous… Sans doute, pour mieux m’asservir vous voudrez bien que je vous embrasse parfois lorsque j’aurai beaucoup imploré… Mais je ne sais pas implorer. Laissez-moi à ma solitude ; elle me convient. Hier soir, quand vous vous êtes tournée vers moi pendant cette musique qui ranimait ma jeunesse, mes ambitions, tout, j’ai cru voir dans vos yeux mon rêve qui se mettait à vivre. J’ai été sur le point de me lever, de vous dire : « Venez ! » et de vous emporter loin pour toujours… Vous m’avez dit une fois que j’étais romantique… c’était bien vu… Je ne sais dans quel monde légendaire j’ai transporté votre image ; il est évident, en tout cas, que c’est hors de la réalité et qu’il y a en moi un point de folie qui est vous… Mais ça se guérit, la folie… Vous voyez je ne suis plus irrité, je vous parle tranquillement… J’espère vous avoir assez aimée pour pouvoir ne pas vous haïr et même vous pardonner… avec le temps.

— Alors nous allons nous quitter… brouillés ?