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détresse l’envahit. Le parfum fort et mat qui imprégnait les vêtements d’Étienne attaqua ses nerfs en désarroi avec une violence soudaine ; elle ne pensa plus à rien, et se rassembla toute dans le sentiment d’une poignante impatience.

Étienne la prit aux épaules d’un geste fort et très doux, ses paupières s’abattirent sous des lèvres chaudes et qu’elle sentit trembler. Elle eut un grand frisson par toute sa peau, une défaillance de la volonté, un plaisir abondant et anxieux rayonna en elle.

Il s’était écarté d’elle, lui tenant les deux bras, et la regardait ; les grandes secousses de son cœur heurtaient les genoux de Jacqueline ; les bruits de la rue coulaient confondus avec le bourdonnement du sang dans ses oreilles. Les yeux d’Étienne avaient une dureté qu’elle ne leur connaissait pas, mais elle n’avait plus peur de lui ni de rien, elle recevait de ce regard une volupté précise qui interrompait le mouvement normal de sa vie. Elle n’aurait pu parler, sa gorge était sèche et dure. Chaque seconde augmentait la sensation d’un définitif isolement où rien ne devait plus les atteindre.

Il lui baisa les yeux, le front, les joues, puis ses mains qui tenaient les bras de Jacqueline serrèrent plus fort, il avait effleuré ses lèvres d’un baiser qui n’osait pas encore. Elle eut au cerveau un choc qui dispersa toute sa pensée. Elle souhaita ne plus rien éprouver jamais, puis elle voulut, douleur ou joie, sentir davantage. Il dit :

— Dieu, comme je t’aime !

Ce tutoiement la traversa d’une souffrance de réveil trop brusque. Elle eut mal dans toutes ses fibres,