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dans une fourrure, puis, tournant autour de la machine, s’assit à côté d’elle en passant avec une brusque dextérité sous le volant de direction.

— Vous avez des couvertures là dedans, n’est-ce pas ? dit-il à Barrois, qui s’installait dans le tonneau, à côté du mécanicien.

— Oui, oui, ne vous occupez pas de moi, songez seulement à la précieuse vie que vous tenez entre vos mains, dit le vieux chimiste.

— Que je tiens entre mes mains ? répéta Étienne.

Puis il eut un rire âpre.

— … Soyez tranquille, j’y songe.

Le moteur secouait la voiture de sa tremblante véhémence. On eût dit d’une bête prise, pleine de colère et d’un vouloir d’échapper. Jacqueline sentait sous ses semelles cette vibration faite d’un désir d’élan, et elle aussi avait ce désir ; une ivresse captive et impatiente battait dans son sang.

— Voulez-vous que nous fassions un tour avant de rentrer ? demanda Marken, qui avait fini de vérifier sa machine et dont les mains posaient sur le volant.

— Oui, allons.

Le tapage tumultueux fondit en un long gémissement, plainte tendre de la force enfin satisfaite, la voiture partit d’un mouvement souple.

Rejetée en arrière par le démarrage, Jacqueline restait appuyée, son épaule frôlant celle d’Étienne.

— Vous n’avez pas peur, n’est-ce pas ?

— Non, allez vite.

Il répondit d’un signe de tête.

L’automobile filait avec une rapidité folle, les arbres au passage semblaient se disloquer, tomber dans des