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attitude, mais cela lui plut. Elle détestait qu’on fût visiblement impulsif ; le geste préparé lui agréait plus que celui qui est émotif et hasardeux, il lui paraissait y découvrir un meilleur fonctionnement de la volonté : depuis quelques semaines elle considérait les manifestations de la volonté consciente comme la seule indication d’une belle vie intérieure.

Cette rencontre sans paroles les isolait de toute la banalité qui s’agitait parmi ce luxe sans passé. Elle se sentit identique de pensée à cet homme et seule avec lui dans la foule.

Une cloche joliment fêlée tinta au fond du paysage ; c’était l’heure de la cérémonie. Cérémonie catholique, cela s’entend de reste ; il y a beau jour que les femmes de la famille Steinweg ont abrité leurs cœurs élégants sous la protection de Rome. Quant au banquier, dès son entrée dans les grandes affaires, il s’est converti au protestantisme, car cet homme connaît son temps et sait comment faire pour parvenir, durer, mener.

Le cortège s’organisa. Cette fête tout intime devait avoir le caractère de la plus touchante simplicité. On allait à pied jusqu’à la petite église du village, par le chemin large aux bords duquel se dressaient de hauts vases de marbre. Des fillettes poudrées, dont les toilettes de satin et de passementeries d’argent avaient été copiées sur des tableaux de Lancret, jetaient des roses devant la mariée. Deux petits garçons en velours blanc portaient la traîne. Devant le cortège, des musiciens costumes marchaient, tournant des vielles, soufflant dans des musettes.

— Donnez-moi votre bras, avait dit Jacqueline à