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Peut-être alors ce qu’il lui avait écrit signifiait-il un peu moins que ce qu’il comptait faire. Mais qu’attendait-il d’elle ?…

Jacqueline allait seule aux Louveteries, le château que madame Steinweg a rendu célèbre par les complications de son faste. André s’était excusé. Il tenait à passer les deux premières semaines d’octobre dans un manoir breton, chez madame d’Audibert, fort jolie veuve qui était venue à Blancheroche au commencement de la saison, et à qui Jacqueline, dont l’indifférence ne laissait pas d’avoir la vue claire, s’était aperçue qu’il faisait une cour discrète mais sûre quant aux résultats. Elle s’était plu à constater que sa vanité même ne souffrait pas des distractions que prenait son mari, et ce flirt avait par comparaison avivé la saveur de sa correspondance avec Étienne Marken. Le caractère des deux occupations différait si essentiellement. Cette belle camaraderie intellectuelle touchant aux mouvements les plus importants de la vie contemporaine, mêlée de soucis d’art, remuant des idées, l’équivoque même du sentiment sur lequel jouaient ces choses profondes et puissantes, l’utilité qu’elle sentait avoir dans la vie morale de cet homme, c’était bien autre chose qu’une petite organisation de plaisir sans lendemain, à la manière de celles dont André s’occupait ! Pauvre André ! Pour s’encourager à l’adorer, elle l’avait imaginé mystérieux, compliqué, plein de gouffres, et ce n’était au résumé qu’un curieux, un sensuel, lassé aussitôt que satisfait. Elle ne s’étonnait plus de n’avoir pu tout d’abord le comprendre ; ils se ressemblaient si peu !

Elle ne doutait pas que madame Steinweg eût invité