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quoi employer une énergie sentimentale qu’elle se trouva. Elle avait emporté une valise pleine de livres traitant du socialisme et de l’anarchie, elle voulait s’éclairer sur les doctrines qui fanatisent des esprits qu’elle s’efforçait encore de croire plus généreux que ceux de la moyenne humanité. Elle en lut plusieurs, consciencieusement, et fut déçue de n’y pas trouver de solutions immédiates. Ces livres lui parurent être des romans tristes et ennuyeux, comme la métaphysique lui avait paru, au temps où Barrois dirigeait ses lectures, un roman romanesque. Elle se découragea, ambitionna des actes d’énergie qui eussent tonifié sa volonté, tout en songeant que les tentatives pour déplacer les conditions normales, plates et lentes de l’existence avortent fatalement. Elle se dit que la vie a un sens, que pénétrer ce sens-là, c’est réussir, — et qu’Erik Hansen, et tous ceux qui veulent changer brusquement quoi que ce soit en manquent déplorablement. — Nul désir précis ne la tentait, elle était bien certaine que rien ne vaut un effort. Tout ce à quoi s’attachait son esprit apparaissait si vain, sous la moindre tentative d’analyse. Elle eut envie de faire des voyages dangereux ; puis, l’idée même de cela l’écœurant, elle cessa d’y penser.

André partant de grand matin en automobile et ne rentrant pas toujours pour dîner, elle était presque constamment seule. La musique lui donnait envie de pleurer ; elle en vint à compter les jours qui la séparaient du 15 août, date où la maison s’emplirait d’invités venus pour les chasses. C’est dans cet état de décousu mental, qu’elle reçut une lettre de Marken. Il s’excusait d’oser lui écrire : le dénouement de