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à rédiger la notice du dictionnaire des célébrités où les faits intimes du peintre, devenu illustre et mort, étaient racontés par le détail, et celui, entre autres, de la rencontre faite un jour d’été, tout au début de sa carrière, d’une femme qu’il n’avait jamais revue et qui lui avait inspiré un de ces amours qui rayonnent parfois sur la vie des grands hommes.

Renonçant à développer davantage son essai monographique, madame des Moustiers descendit. Le jeune homme était déjà sur le trottoir ; ôtant son trop vaste feutre, il rendit la liberté à une quantité de mèches noires et plates qui se mirent à l’aise autour de son visage, l’une d’elles menaçant d’entrer dans son œil gauche sans qu’il parût d’ailleurs éprouver la moindre gêne de cet état de choses. Sa fine et laide figure était toute réchauffée par ses yeux actifs ; il dit très respectueusement :

— Vous m’avez ramené chez moi, madame, je vous remercie bien. Puis-je espérer que vous me fassiez l’honneur de visiter mon atelier ?

Sans le regarder, Jacqueline entra dans la loge :

— Madame Gambier ? demanda-t-elle.

— C’est au sixième, au bout du corridor, à gauche, répondit la concierge. Madame est peut-être la personne que la mère Gambier nous annonce depuis si longtemps et qui doit payer ses deux termes ?… J’ai les ordres du propriétaire pour la mettre dehors… Du reste, quand madame l’aura vue… Ah ! vous voilà, monsieur Roustan, ajouta-t-elle en apercevant le jeune homme debout derrière Jacqueline. Attendez voir, j’ai une lettre pour vous, de vot’ maman, j’crois bien. Tenez, la v’là. Et puis il est venu deux messieurs qui