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— Où ? Ah ! oui, c’est mon mari et madame Simpson. Comment as-tu deviné qu’ils me cherchaient ? Viens, je vais te les présenter.

— C’est ton mari ?… Il faut que je te quitte. Je dois voir quelqu’un. Nous nous retrouverons ce soir après le théâtre.

— Veux-tu dîner avec nous ?

— Je ne peux pas… Au revoir.

— Au revoir. Mais… sûrement ? Tu as tout à coup un air si bizarre ! On dirait que tu ne peux plus supporter d’être avec moi. Que t’arrive-t-il ?

— Rien. Ça m’agace de sentir que je fais attendre. Sois tranquille, je ne vais pas prendre le train. Si je ne voulais plus te voir, je le dirais… et ce serait comme j’aurais dit !

Léonora s’éloigna d’un pas vif. Jacqueline regarda filer, preste entre les groupes, sa silhouette d’une vigueur déliée, puis, lorsqu’elle ne vit plus même le chapeau sombre sur la masse des cheveux noirs, sa solitude prit un goût de détresse ; elle chercha des yeux son mari.

M. des Moustiers venait de s’arrêter. Il causait avec deux femmes. Lentement Jacqueline marcha vers eux. Elle imaginait leurs propos. Une des belles dames balançait sa tête coiffée délicieusement, et de la main faisait un geste las, où s’exprimait le désarroi des admirations excessives. Elle devait dire : « Ah ! ce Wagner !… » Jacqueline tourna court et vint au bord de la terrasse.

Tranquille, plate et rose, Bayreuth était couchée dans le calme de sa plaine. Une cheminée d’usine fumant contre le ciel pâle veillait seule au-dessus de