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et le baisa, sur la tempe. L’instant suivant, leurs bouches furent rejointes, et Jacqueline, dont la sensibilité était en travail depuis la veille, connut par ce baiser une émotion neuve, d’une activité prodigieuse, et où s’exaltaient la détresse récente, la peur du risque, l’espoir d’infini.

Les mains tremblantes d’Erik, glissant sur elle en hésitantes caresses, chargeaient ses nerfs de violence. Quand leurs lèvres douloureuses se séparèrent, il y avait un accord entre leurs émotions exaspérées. Ils étaient en cet état puissant où la volonté supprime le passé et nie l’avenir pour se ramasser toute sur l’instant qui seul importe. Jacqueline ne pensait plus à rien, elle appartenait sans lutte à l’impérieuse nature, qui contraint les êtres à se rechercher l’âme au travers de la volupté.

Elle se leva en même temps que lui comme si une seule intention commandait leurs muscles, et ne résista pas au bras passé autour d’elle et qui la conduisait vers la porte ouverte. Elle savait qu’ils allaient ainsi vers l’irréparable, elle n’hésitait pas, elle était fière de se sentir libre.

Dans la chambre, au premier regard, elle vit le lit étroit contre le mur et s’arrêta, une seconde, devant la précision de sa pensée. Elle allait se donner, comme font les autres, comme avait fait Maud. Mais André, c’était l’infidèle pour qui l’amour n’engage pas la vie ; Erik ne l’aimait pas ainsi. Puis, brusque, elle se dit : « Il est trop tard, d’ailleurs, je l’ai voulu, je le veux… »

Elle eut la vision de son départ de cette chambre, lorsqu’une heure plus tard elle s’en irait avec la moiteur