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dialogues philosophiques

beaucoup de cette espèce) ose nier souvent le Dieu dont on lui a fait une peinture révoltante.

Un autre méchant, qui a de grandes passions dans une âme faible, est souvent invité à l’iniquité par la sûreté du pardon que les prêtres lui offrent. « De quelque multitude énorme de crimes que vous soyez souillé, confessez-vous à moi, et tout vous sera pardonné par les mérites d’un homme qui fut pendu en Judée il y a plusieurs siècles. Plongez-vous, après cela, dans de nouveaux crimes sept fois soixante et sept fois, et tout vous sera pardonné encore. » N’est-ce pas là véritablement induire en tentation ? n’est-ce pas aplanir toutes les voies de l’iniquité ? La Brinvilliers ne se confessait-elle pas à chaque empoisonnement qu’elle commettait ? Louis XI autrefois n’en usait-il pas de même ?

Les anciens avaient, comme nous, leur confession et leurs expiations ; mais on n’était pas expié pour un second crime. On ne pardonnait point deux parricides. Nous avons tout pris des Grecs et des Romains, et nous avons tout gâté.

Leur enfer était impertinent, je l’avoue ; mais nos diables sont plus sots que leurs furies. Ces furies n’étaient pas elles-mêmes damnées ; on les regardait comme les exécutrices, et non comme les victimes des vengeances divines. Être à la fois bourreaux et patients, brûlants et brûlés, comme le sont nos diables, c’est une contradiction absurde, digne de nous, et d’autant plus absurde que la chute des anges, ce fondement du christianisme, ne se trouve