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dialogues philosophiques

ques Clément, Châtel, Guignard, Ravaillac, aiguisez vos sacrés poignards, chargez vos saints pistolets. Europe, nage dans le sang, tandis que le vicaire de Dieu, Alexandre VI, souillé de meurtres et d’empoisonnements, dort dans les bras de sa fille Lucrèce, que Léon X nage dans les plaisirs, que Paul III enrichit son bâtard des dépouilles des nations, que Jules III fait son porte-singe cardinal (dignité plus convenable encore au singe qu’au porteur) ; tandis que Pie IV fait étrangler le cardinal Caraffe, que Pie V fait gémir les Romains sous les rapines de son bâtard Buon-Compagno ; que Clément VIII donne le fouet au grand Henri IV sur les fesses des cardinaux d’Ossat et Duperron. Mêlez partout le ridicule de vos farces italiennes à l’horreur de vos brigandages ; et puis envoyez frère Trigaut et frère Bouvet prêcher la bonne nouvelle à la Chine.


LE CALOYER. — Je ne puis condamner votre zèle. La vérité, contre laquelle on se débat en vain, me force de convenir d’une partie de ce que vous dites ; mais enfin convenez aussi que, parmi tant de crimes, il y a eu de grandes vertus. Faut-il que les abus vous aigrissent, et que les bonnes lois ne vous touchent pas ? ajoutez à ces bonnes lois des miracles qui sont la preuve de la divinité de Jésus-Christ.


L’HONNÊTE HOMME. — Des miracles ? juste ciel ! et quelle religion n’a pas ses miracles ? tout