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dialogues philosophiques

capitation, ait dit que ses disciples ne devaient rien payer ; que les rois « ne reçoivent des impôts que des étrangers, et que les enfants en sont exempts ? »


L’ABBÉ. — Ces discours qui scandalisent sont expliqués par des passages tout différents.


LE COMTE. — Juste ciel ! qu’est-ce qu’un Dieu qui a besoin de commentaire, et à qui l’on fait dire perpétuellement le pour et le contre ? qu’est-ce qu’un législateur qui n’a rien écrit ? qu’est-ce que quatre livres divins dont la date est inconnue, et dont les auteurs, si peu avérés, se contredisent à chaque page ?


L’ABBÉ. — Tout cela se concilie, vous dis-je. Mais vous m’avouerez du moins que vous êtes très content du discours sur la montagne.


LE COMTE. — Oui ; on prétend que Jésus a dit qu’on brûlera ceux qui appellent leur frère Raca, comme vos théologiens font tous les jours. Il dit qu’il est venu pour accomplir la loi de Moïse, que vous avez en horreur. Il demande avec quoi on salera si le sel s’évanouit. Il dit que bienheureux sont les pauvres d’esprit, parce que le royaume des cieux est à eux. Je sais encore qu’on lui fait dire qu’il faut que le blé pourrisse et meure en terre pour germer ; que le royaume des cieux est un grain de moutarde ; que c’est de l’argent mis à usure ; qu’il ne faut pas donner à dîner à ses parents quand ils sont riches.