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dialogues philosophiques

avide de nouveautés. La morale de ces nouveaux venus n’est certainement pas meilleure que la vôtre et la nôtre ; elle est même pernicieuse. On fait dire à ce Jésus : « qu’il est venu apporter la guerre, et non la paix ; qu’il ne faut pas prier ses amis à dîner quand ils sont riches ; qu’il faut jeter dans un cachot celui qui n’aura pas une belle robe au festin : qu’il faut contraindre les passants de venir à son festin », et cent autres bêtises atroces de la même espèce.

« Comme les livres chrétiens se contredisent à chaque page, ils lui font dire aussi qu’il faut aimer son prochain, quoique ailleurs il prononce qu’il faut haïr son père et sa mère pour être digne de lui ; mais, par une erreur inconcevable, on trouve dans l’Évangile attribué à Jean ces propres paroles : « Je fais un commandement nouveau, c’est de vous aimer les uns les autres. » Comment peut-il donner l’épithète de nouveau à ce commandement, puisque ce précepte est de toutes les religions, et qu’il est expressément énoncé dans la nôtre en termes infiniment plus forts : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » ?

« Vous voyez, magnanime empereur, comme, dans les choses les plus raisonnables, les chrétiens introduisent l’imposture et le déraisonnement. Ils couvrent toutes leurs innovations des voiles du mystère et des apparences de la sanctification. On les voit courir de ville en ville, de bourgade en bourgade, ameuter les femmes et les filles ; ils leur prêchent la fin du monde. Selon eux, le monde va finir ; leur