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Traité ſur la Tolérance. Chap. XI.

l’indépendance de la Couronne, comme une Loi fondamentale. Le Cardinal Duperron, qui devait la pourpre à Henri-le-Grand, s’éleva dans les États de 1614 contre l’Arrêt du Parlement, & le fit ſupprimer. Tous les Journaux du temps rapportent les termes dont Duperron ſe ſervit dans ſes harangues : Si un Prince ſe faiſait Arien, dit-il, on ſerait bien obligé de le dépoſer.

Non aſſurément, Monſieur le Cardinal ; on veut bien adopter votre ſuppoſition chimérique, qu’un de nos Rois ayant lu l’Hiſtoire des Conciles & des Pères, frappé d’ailleurs de ces paroles, mon Père eſt plus grand que moi, les prenant trop à la lettre,

    Il faut avouer que Jean Gerſon, Chancelier de l’Univerſité, alla encore plus loin que St. Thomas, & le Cordelier Jean Petit, infiniment plus loin que Gerſon. Pluſieurs Cordeliers ſoutinrent les horribles Thèſes de Jean Petit. Il faut avouer que cette doctrine diabolique du Régicide vient uniquement de la folle idée où ont été longtemps preſque tous les Moines, que le Pape eſt un Dieu en terre, qui peut diſpoſer à ſon gré du Trône & de la vie des Rois. Nous avons été en cela fort au-deſſus de ces Tartares qui croyent le grand Lama immortel ; il leur diſtribue ſa chaiſe percée, ils font ſécher ces reliques, les enchâſſent, & les baiſent dévotement. Pour moi, j’avoue que j’aimerois mieux, pour le bien de la paix, porter à mon cou de telles reliques, que de croire que le Pape ait le moindre droit ſur le temporel des Rois, ni même ſur le mien, en quelque cas que ce puiſſe être.

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