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Traité ſur la Tolérance. Chap. VII.

pas des autres Sectes, qui toutes bleſſaient les idées ſaines qu’on doit avoir, de l’Être créateur, & qui toutes étaient tolérées.

Socrate qui approcha le plus près de la connaiſſance du Créateur, en porta, dit-on, la peine, & mourut martyr de la Divinité ; c’eſt le ſeul que les Grecs ayent fait mourir pour ſes opinions. Si ce fut en effet la cauſe de ſa condamnation, cela n’eſt pas à l’honneur de l’Intolérance, puiſqu’on ne punit que celui qui ſeul rendit gloire à Dieu, & qu’on honora tous ceux qui donnaient de la Divinité les notions les plus indignes. Les ennemis de la tolérance ne doivent pas, à mon avis, ſe prévaloir de l’exemple odieux des Juges de Socrate.

Il eſt évident d’ailleurs, qu’il fut la victime d’un parti furieux animé contre lui. Il s’était fait des ennemis irréconciliables des Sophiſtes, des Orateurs, des Poëtes, qui enſeignaient dans les Écoles, & même de tous les Précepteurs qui avaient ſoin des enfants de diſtinction. Il avoue lui-même dans ſon Diſcours rapporté par Platon, qu’il allait de maiſon en maiſon prouver à ces Précepteurs qu’ils n’étaient que des ignorants : cette conduite n’était pas digne de celui qu’un Oracle avait déclaré le plus ſage des hommes. On déchaîna contre lui un Prêtre, & un Conſeiller des cinq cents, qui l’accuſèrent ; j’avoue que je ne