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Traité ſur la Tolérance. Chap. IV.

la tête au grand Penſionnaire. On ne craint plus à Londres que les querelles des Preſbytériens & des Epiſcopaux pour une Lithurgie & pour un ſurplis, répandent le ſang d’un Roi ſur un échafaud.[1] L’Irlande peuplée & enrichie, ne verra plus ſes Citoyens Catholiques ſacrifier à Dieu pendant deux mois ſes Citoyens Proteſtants, les enterrer vivants, ſuſpendre les mères à des gibets, attacher les filles au cou de leurs mères, & les voir expirer enſemble ; ouvrir le ventre des femmes enceintes, en tirer les enfants à

  1. Un Déclamateur, dans l’Apologie de la Révocation de l’Édit de Nantes, dit, en parlant de l’Angleterre : une fauſſe Religion devait produire néceſſairement de tels fruits ; il en reſtait un ſeul à mûrir, ces Inſulaires le recueillent, c’eſt le mépris des Nations. Il faut avouer que l’Auteur prend mal ſon temps pour dire que les Anglais ſont mépriſables & mépriſés de toute la terre. Ce n’eſt pas, ce me ſemble, lorſqu’une Nation ſignale ſa bravoure & ſa généroſité, lorſqu’elle eſt victorieuſe dans les quatre parties du Monde, qu’on eſt bien reçu à dire qu’elle eſt mépriſable & mépriſée. C’eſt dans un Chapitre ſur l’Intolérance, qu’on trouve ce ſingulier paſſage. Ceux qui prêchent l’Intolérance, méritent d’écrire ainſi. Cet abominable Livre, qui ſemble fait par le fou de Verberies, eſt d’un homme ſans miſſion : car quel Paſteur écrirait ainſi ? La fureur eſt pouſſée dans ce Livre juſqu’à juſtifier la St. Barthelemi. On croirait qu’un tel Ouvrage, rempli de ſi affreux paradoxes, devrait être entre les mains de tout le monde, au moins par ſa ſingularité ; cependant à peine eſt-il connu.