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Traité ſur la Tolérance. Chap. XXIV.

ce ; cela eſt ſenſé & adroit : & de ce que Bayle accorde qu’il faut punir les factieux & les fripons, notre homme en conclut qu’il faut perſécuter à feu & à ſang les gens de bonne foi qui ſont paiſibles, page 98.

Preſque tout ſon livre eſt une imitation de l’Apologie de la St. Barthélémi. C’eſt cet Apologiſte ou ſon écho. Dans l’un ou dans l’autre cas, il faut eſpérer que ni le Maître ni le Diſciple ne gouverneront l’État.

Mais s’il arrive qu’ils en ſoient les Maîtres, je leur préſente de loin cette Requête, au ſujet de deux lignes de la page 93 du ſaint Libelle :

Faut-il ſacrifier au bonheur du vingtième de la Nation, le bonheur de la Nation entière ?

Suppoſez qu’en effet il y ait vingt Catholiques Romains en France contre un Huguenot, je ne prétends point que le Huguenot mange les vingt Catholiques ; mais auſſi, pourquoi ces vingt Catholiques mangeraient-ils ce Huguenot ? & pourquoi empêcher ce Huguenot de ſe marier ? N’y a-t-il pas des Évêques, des Abbés, des Moines qui ont des Terres en Dauphiné, dans le Gévaudan, devers Agde, devers Carcaſſonne ? Ces Évêques, ces Abbés, ces Moines, n’ont-ils pas des Fermiers qui ont le malheur de ne pas croire à la tranſſubſtantiation ? N’eſt-il pas de l’intérêt des Évêques, des Abbés, des Moines, & du