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Traité ſur la Tolérance. Chap. XIV.

que nous prodiguons de conſidération à nos frères les Traitants ?

Un autre paſſage, dont on a fait un abus groſſier, eſt celui de St. Mathieu & de St. Marc, où il eſt dit que Jésus ayant faim le matin, approcha d’un figuier, où il ne trouva que des feuilles : car ce n’était pas le temps des figues : il maudit le figuier qui ſe ſécha auſſi-tôt.

On donne pluſieurs explications différentes de ce miracle : mais y en a-t-il une ſeule qui puiſſe autoriſer la perſécution ? Un figuier n’a pu donner des figues vers le commencement de Mars, on l’a ſéché : eſt-ce une raiſon pour faire ſécher nos frères de douleur dans tous les temps de l’année ? Reſpectons dans l’Écriture tout ce qui peut faire naître des difficultés dans nos eſprits curieux & vains, mais n’en abuſons pas pour être durs & implacables.

L’eſprit perſécuteur qui abuſe de tout, cherche encore ſa juſtification dans l’expulſion des Marchands chaſſés du Temple, & dans la légion de Démons envoyée du corps d’un poſſédé dans le corps de deux mille animaux immondes. Mais qui ne voit que ces deux exemples ne ſont autre choſe qu’une juſtice que Dieu daigne faire lui-même d’une contravention à la Loi ? C’était manquer de reſpect à la Maiſon du Seigneur, que de changer ſon parvis en une bouti-