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Traité ſur la Tolérance. Chap. XII.

nons-nous dans les bornes de notre ſujet ; voyons d’abord ce qu’était l’Intolérance chez les Juifs.

Il eſt vrai que dans l’Exode, les Nombres, le Lévitique, le Deutéronome, il y a des Loix très-ſévères ſur le Culte, & des châtiments plus ſévères encore. Pluſieurs Commentateurs ont de la peine à concilier les récits de Moïſe avec les paſſages de Jérémie & d’Amos, & avec le célèbre Diſcours de St. Étienne, rapporté dans les Actes des Apôtres. Amoſ dit queAmos, Chap. 5, v. 26.

    ment, & à ſoutenir qu’il ne leur a point donné de ſentiment.

    Il me paraît encore qu’il faut n’avoir jamais obſervé les animaux, pour ne pas diſtinguer chez eux les différentes voix du beſoin, de la ſouffrance, de la joye, de la crainte, de l’amour, de la colère, & de toutes leurs affections ; il ſerait bien étrange qu’elles exprimaſſent ſi bien ce qu’elles ne ſentiraient pas.

    Cette remarque peut fournir beaucoup de réflexions aux eſprits exercés, ſur le pouvoir & la bonté du Créateur, qui daigne accorder la vie, le ſentiment, les idées, la mémoire aux êtres que lui-même a organiſés de ſa main toute-puiſſante. Nous ne ſavons ni comment ces organes ſe ſont formés, ni comment ils ſe développent, ni comment on reçoit la vie, ni par quelles Loix les ſentiments, les idées, la mémoire, la volonté ſont attachés à cette vie : & dans cette profonde & éternelle ignorance, inhérente à notre nature, nous diſputons ſans ceſſe, nous nous perſécutons les uns les autres, comme les taureaux qui ſe battent avec leurs cornes, ſans ſavoir pourquoi & comment ils ont des cornes.