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Salomon.

ouvrages d’éloquence des Hébreux, sans liaison, sans suite, plein de répétitions, confus, ridiculement métaphorique ; mais il y a des endroits qui respirent la naïveté & l’amour.

Le Livre de la Sagesse est dans un goût plus sérieux ; mais il n’est pas plus de Salomon que le Cantique des Cantiques. On l’attribue communément à Jésus fils de Sirac, d’autres à Philon de Biblos ; mais quel que soit l’auteur, il paraît que de son tems on n’avait point encor le Pentateuque, car il dit au chap. 10. qu’Abraham voulut immoler Isaac du tems du déluge ; & dans un autre endroit, il parle du patriarche Joseph comme d’un Roi d’Égypte.

Pour l’Ecclésiaste, dont nous avons déjà parlé, Grotius prétend qu’il fut écrit sous Zorobabel. Nous avons vû avec quelle liberté l’auteur de l’Ecclésiaste s’exprime ; on sait qu’il dit que les hommes n’ont rien de plus que les bêtes ; qu’il vaut mieux n’être pas né que d’exister ; qu’il n’y a point d’autre vie, qu’il n’y a rien de bon que de se réjouïr dans ses œuvres avec celle qu’on aime.

Il se pourrait faire que Salomon eût tenu de tels discours à quelques-unes de ses femmes ; on prétend que ce sont des objections qu’il se fait ; mais ces maximes qui ont l’air un peu libertin, ne ressemblent point du tout à des objections ; & c’est se moquer du monde, d’entendre dans un auteur le contraire de ce qu’il dit.