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Salomon.

tan des Turcs n’a eu de si nombreuses armées ; il y avait là de quoi conquérir la terre. Ces contradictions semblent exclure tout raisonnement : mais ceux qui veulent raisonner trouvent difficile que David qui succède à Saül vaincu par les Philistins, ait pû pendant son administration fonder un vaste empire.

Les richesses qu’il laissa à Salomon sont encor plus incroyables : il lui donna comptant cent trois mille talents d’or, & un million treize mille talents d’argent. Le talent d’or des Hébreux vaut environ six mille livres sterling ; le talent d’argent environ cinq cents livres sterling. La somme totale du legs en argent comptant, sans les pierreries & les autres effets, & sans le revenu ordinaire proportionné sans doute à ce trésor, montait à un milliard cent dix-neuf millions cinq cent mille livres sterling, ou à cinq milliards cinq cent quatre-vingt-dix-sept millions d’écus d’Allemagne, ou à vingt-cinq milliards six cent quarante-huit millions de France : il n’y avait pas alors autant d’espèces circulantes dans le monde entier.

On ne voit pas après cela pourquoi Salomon se tourmentait tant à envoyer ses flottes au pays d’Ophir pour rapporter de l’or. On devine encor moins comment ce puissant Monarque n’avait pas dans ses vastes États un seul homme qui sût couper du bois dans la forêt du Liban. Il fut obligé de prier Hiram roi de Tyr de lui prêter des fendeurs de bois & des ouvriers pour le mettre en ouvre. Il faut avouer que