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Batême.

immortelle Satire des Césars, met ces paroles dans la bouche de Constance fils de Constantin : « Quiconque se sent coupable de viol, de meurtre, de rapine, de sacrilège, & de tous les crimes les plus abominables, dès que je l’aurai lavé avec cette eau, il sera net & pur. »

C’est en effet cette fatale doctrine qui engagea tous les Empereurs chrétiens & tous les grands de l’empire à différer leur batême jusqu’à la mort. On croyait avoir trouvé le secret de vivre criminel & de mourir vertueux.

(Tiré de Mr. Boulanger.)
Autre addition.

Quelle étrange idée tirée de la lessive qu’un pot d’eau nettoie tous les crimes ! aujourd’hui qu’on batise tous les enfans, parce qu’une idée non moins absurde les supposa tous criminels, les voilà tous sauvés jusqu’à ce qu’ils aient l’âge de raison & qu’ils puissent devenir coupables. Égorgez-les donc au plus vîte pour leur assurer le paradis. Cette conséquence est si juste qu’il y a eu une secte dévote qui s’en allait empoisonnant ou tuant tous les petits enfans nouvellement baptisés. Ces dévots raisonnaient parfaitement. Ils disaient : « Nous faisons à ces petits innocens le plus grand bien possible. Nous les empêchons d’être méchants & malheureux dans cette vie, & nous leur donnons la vie éternelle. »

(de Mr. l’abbé Nicaise.)