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Genèse.

vium græca nec latina novit historia : ni l’histoire grecque ni la latine ne connaissent ce grand déluge. En effet on n’a jamais connu que ceux de Deucalion & d’Ogigès en Grèce, regardés comme universels dans les fables recueillies par Ovide, mais totalement ignorés dans l’Asie orientale.

Dieu dit à Noé, Je vais faire alliance avec vous & avec votre semence après vous, & avec tous les animaux.

Dieu faire alliance avec les bêtes ! quelle alliance ! mais s’il s’allie avec l’homme, pourquoi pas avec la bête ? elle a du sentiment, & il y a quelque chose d’aussi divin dans le sentiment que dans la pensée la plus métaphysique. D’ailleurs, les animaux sentent mieux que la plupart des hommes ne pensent. C’est apparemment en vertu de ce pacte que François d’Assise, fondateur de l’ordre séraphique, disait aux cigales & aux lièvres, Chantez, ma sœur la cigale, broutez, mon frère le levraut. Mais quelles ont été les conditions du traité ? que tous les animaux se dévoreraient les uns les autres, qu’ils se nourriraient de notre sang & nous du leur, qu’après les avoir mangés nous nous exterminerions avec rage, & qu’il ne nous manquerait plus que de manger nos semblables égorgés par nos mains. S’il y avait eu un tel pacte, il aurait été fait avec le Diable. Probablement tout ce passage ne veut dire autre chose sinon que Dieu est également le maître absolu de tout ce qui respire.