Page:Voltaire - La Raison par alphabet, 6e édition, Cramer, 1769, tome 1.djvu/178

Cette page a été validée par deux contributeurs.
172
Histoire.

de Lyon, écrite l’an 117, & qui est un précieux monument de l’antiquité. On loüe dans cette lettre la modestie de quelques fidèles : Ils n’ont pas voulu, dit la lettre, prendre le grand titre de martyrs, (pour quelques tribulations) à l’exemple de Jésus-Christ, lequel étant empreint de Dieu, n’a pas cru sa proye la qualité d’égal à Dieu. Origène dit aussi dans son Commentaire sur Jean ; La grandeur de Jésus a plus éclaté quand il s’est humilié, que s’il eût fait sa proye d’être égal à Dieu. En effet, l’explication contraire est un contresens visible. Que signifierait, Croyez les autres supérieurs à vous ; imitez Jésus qui n’a pas cru que c’était une proye, une usurpation, de s’égaler à Dieu ? Ce serait visiblement se contredire, ce serait donner un exemple de grandeur pour un exemple de modestie, ce serait pécher contre le sens commun.

La sagesse des apôtres fondait ainsi l’Église naissante. Cette sagesse ne fut point altérée par la dispute qui survint entre les apôtres Pierre, Jaques & Jean d’un côté, & Paul de l’autre. Cette contestation arriva à Antioche. L’apôtre Pierre, autrement Céphas, ou Simon Barjone, mangeait avec les gentils convertis, & n’observait point avec eux les cérémonies de la loi, ni la distinction des viandes ; il mangeait, lui, Barnabé, & d’autres disciples, indifféremment du porc, des chairs étouffées, des animaux qui avaient le pied fendu & qui ne ruminaient pas ; mais plusieurs Juifs chrétiens arrivés, St. Pierre se remit avec eux à l’abstinence des viandes défendues, & aux cérémonies de la loi Mosaïque.