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XXX.

On dit dans ce même Contract Social que la Monarchie ne convient qu’aux Nations opulentes, l’Ariſtocratie aux Etats médiocres en richeſſes ainſi qu’en grandeur, la Démocratie aux Etats petits & pauvres.

Mais au quatorzieme ſiecle, au quinzieme & au commencement du ſeizieme, les Vénitiens étoient le ſeul peuple riche ; ils ont encore beaucoup d’opulence : cependant Veniſe n’a jamais été & ne ſera jamais une monarchie. La République Romaine fut très riche depuis les Scipions juſqu’à Céſar. Lucques eſt petite & peu riche, & eſt une Ariſtocratie. L’opulente & ingénieuſe Athènes étoit un état Démocratique.

Nous avons des Citoyens très-riches, & nous compoſons un gouvernement mêlé de Démocratie & d’Ariſtocratie ; Ainſi il faut ſe défier de toutes ces régles générales qui n’exiſtent que ſous la plume des Auteurs.

XXX.

Le partage que fait l’Auteur du Contract Social n’eſt pas une maxime de Légiſlateur. C’eſt le fruit d’une oiſeuſe ſpéculation, & il ne le donne que pour tel ; encore ne parle-t-il pas de la maniere que ſuppoſe M. D. V. M. R. avance que l’Ariſtocratie ne conviendroit qu’aux Etats médiocres en richeſſes, ainſi que la Démocratie aux Etats petits & pauvres ; il donne pour raiſon de cette diſtribution la différence des charges ; mais il ne dit pas qu’un Etat Démocratique ou Ariſtocratique ne puiſſe être riche. Les traits d’érudition de l’Auteur ſont donc mal appliqués.