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ressemble à ces fondateurs d’ordres, qui vivaient dans l’indigence, & dont les successeurs sont devenus grands seigneurs.

Le pape successeur de Pierre a tantôt gagné, tantôt perdu ; mais il lui reste encor environ cinquante millions d’hommes sur la terre, soumis en plusieurs points à ses loix, outre ses sujets immédiats.

Se donner un maître à trois ou quatre cents lieues de chez soi ; attendre pour penser que cet homme ait paru penser ; n’oser juger en dernier ressort un procès entre quelques-uns de ses concitoyens, que par des commissaires nommés par cet étranger ; n’oser se mettre en possession des champs & des vignes qu’on a obtenus de son propre roi, sans payer une somme considérable à ce maître étranger ; violer les loix de son pays qui défendent d’épouser sa nièce, & l’épouser légitimement en donnant à ce maître étranger une somme encor plus considérable ; n’oser cultiver son champ le jour que cet étranger veut qu’on célèbre la mémoire d’un inconnu qu’il a mis dans le ciel de son autorité privée ; c’est là en partie ce que c’est que d’admettre un pape ; ce sont là les libertés de l’Église gallicane.

Il y a quelques autres peuples qui portent plus loin leur soumission. Nous avons vu de nos jours un souverain demander au pape la permission de faire juger par son tribunal royal des moines accusés de parricide, ne pouvoir obtenir cette permission, & n’oser les juger !