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pour jamais dans la nature.

Pourquoi Dieu ferait-il un miracle ? Pour venir à bout d’un certain dessein sur quelques êtres vivans ! Il dirait donc, Je n’ai pu parvenir, par la fabrique de l’univers, par mes décrets divins, par mes loix éternelles, à remplir un certain dessein : je vais changer mes éternelles idées, mes loix immuables, pour tâcher d’exécuter ce que je n’ai pu faire par elles. Ce serait un aveu de sa faiblesse, & non de sa puissance. Ce serait, ce semble, dans lui la plus inconcevable contradiction. Ainsi donc, oser supposer à Dieu des miracles, c’est réellement l’insulter (si des hommes peuvent insulter Dieu.) C’est lui dire, Vous êtes un être faible & inconséquent. Il est donc absurde de croire des miracles, c’est déshonorer en quelque sorte la Divinité.

On presse ces philosophes : on leur dit, Vous avez beau exalter l’immutabilité de l’Être suprême, l’éternité de ses loix, la régularité de ses mondes infinis : notre petit tas de boue a été tout couvert de miracles ; les histoires sont aussi remplies de prodiges que d’événements naturels. Les filles du grand prêtre Anius changeaient tout ce qu’elles voulaient en blé, en vin, ou en huile ; Athalide fille de Mercure ressuscita plusieurs fois ; Esculape ressuscita Hipolite ; Hercule arracha Alceste à la mort ; Herès revint au monde après avoir passé quinze jours dans les enfers. Romulus & Rémus naquirent d’un dieu & d’une vestale ; le Palladium