Page:Voltaire - Dictionnaire philosophique portatif, 6e édition, tome 1.djvu/86

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

œuvres posthumes de Mylord Bolingbroke, & que Mylord Shaftsbury avait auparavant inséré dans ses caractéristiques. Lisez dans Shaftsbury le chapitre des moralistes, vous y verrez ces paroles.

« On a beaucoup à répondre à ces plaintes des défauts de la nature. Comment est-elle sortie si impuissante & si défectueuse des mains d’un être parfait ? mais je nie qu’elle soit défectueuse… sa beauté résulte des contrariétés, & la concorde universelle naît d’un combat perpétuel… Il faut que chaque être soit immolé à d’autres ; les végétaux aux animaux, les animaux à la terre… & les loix du pouvoir central & de la gravitation, qui donnent aux corps célestes leur poids & leur mouvement, ne seront point dérangées pour l’amour d’un chétif animal, qui tout protégé qu’il est par ces mêmes loix, sera bientôt par elles réduit en poussiére. »

Bolingbroke, Shaftsbury, & Pope, leur metteur en œuvre, ne résolvent pas mieux la question que les autres : leur tout est bien, ne veut dire autre chose, sinon que le tout est dirigé par des loix immuables ; qui ne le sçait pas ? vous ne nous aprenez rien quand vous remarquez après tous les petits enfans, que les mouches sont nées pour être mangées par des araignées, les araignées par les hirondelles, les hirondelles par les pigrièches, les pigrièches par les aigles, les aigles pour être tués par les hom-