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Mais, chez les gentils, plusieurs sectes n’avaient aucun frein ; les sceptiques doutaient de tout ; les académiciens suspendaient leur jugement sur tout ; les Epicuriens étaient persuadés que la Divinité ne pourrait se mêler des affaires des hommes ; & dans le fonds, ils n’admettaient aucune divinité. Ils étaient convaincus que l’ame n’est point une substance, mais une faculté qui nait & qui périt avec le corps, par conséquent ils n’avaient aucun joug que celui de la morale & de l’honneur. Les sénateurs & les chevaliers Romains étaient de véritables Athées, car les Dieux n’existaient pas pour des hommes qui ne craignaient ni n’espéraient rien d’eux. Le sénat Romain était donc réellement une assemblée d’Athées du temps de César & de Cicéron.

Ce grand orateur dans sa harangue pour Cluentius, dit à tout le sénat assemblé, quel mal lui fait la mort ? nous rejettons toutes les fables ineptes des enfers, qu’est-ce donc que la mort lui a ôté ? Rien que le sentiment des douleurs.

César, l’ami de Catilina, voulant sauver la vie de son ami, contre ce même Cicéron, ne lui objecte-t-il pas que ce n’est point punir un criminel que de le faire mourir, que la mort n’est rien, que c’est seulement la fin de nos maux, que c’est un moment plus heureux que fatal ? Cicéron, & tout le sénat ne se rendent-ils pas à ces raisons ? Les vainqueurs & les législateurs de l’Univers connu, formaient donc visiblement une société d’hommes qui ne crai-