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Un homme qui prononcerait parmi nous le mot qui répond à futuo, serait regardé comme un crocheteur ivre ; ce mot, & plusieurs autres dont se servent Horace, & d’autres auteurs, nous paraît encor plus indécent que les expressions d’Ézéchiel. Défaisons-nous de tous nos préjugés quand nous lisons d’anciens auteurs, ou que nous voyageons chez des nations éloignées. La nature est la même partout, & les usages partout différents.

N.B. Je rencontrai un jour dans Amsterdam un rabbin tout plein de ce chapitre. Ah ! mon ami, dit-il, que nous vous avons d’obligation ! Vous avez fait connaître toute la sublimité de la loi mosaïque, le déjeuner d’Ézéchiel, ses belles attitudes sur le côté gauche ; Oholla & Oliba sont choses admirables, ce sont des types, mon frère, des types, qui figurent qu’un jour le peuple juif sera maître de toute la terre ; mais pourquoi en avez-vous omis tant d’autres qui sont à peu près de cette force ? pourquoi n’avez-vous pas représenté le Seigneur disant au sage Osée dès le second verset du premier chapitre. Osée, prends une fille de joie, & fais-lui des fils de fille de joie. Ce sont ses propres paroles. Osée prit la demoiselle, il en eut un garçon, & puis une fille, & puis encor un garçon, & c’était un type, & ce type dura trois années. Ce n’est pas tout, dit le Seigneur au 3e chapitre. Va-t’en prendre une femme qui soit non seulement débauchée, mais adultère ; Osée obéit, mais il lui en coûta quinze écus, & un setier & demi d’orge ; car vous savez que dans la terre promise il y avait très-peu de froment. Mais savez-vous ce que tout cela signifie ? Non, lui dis-je ; Ni moi non plus, dit le rabbin.

Un grave savant s’approcha & nous dit que c’était des fictions ingénieuses & toutes remplies d’agrément. Ah, monsieur, lui répondit un jeune homme fort instruit, si vous voulez des fictions, croyez-moi, préférez celles d’Homère, de Virgile & d’Ovide, quiconque aime les prophéties d’Ézéchiel mérite de déjeuner avec lui.

Évangile

C’est une grande question de savoir quels sont les premiers Évangiles. C’est une vérité constante, quoi qu’en dise Abadie, qu’aucun des premiers Pères de l’Église inclusivement jusqu’à Irénée, ne cite aucun passage des quatre Évangiles que nous connaissons. Au contraire les alloges, les théodosiens rejetèrent constamment l’Évangile de Saint Jean, & ils en parlaient toujours avec mépris, comme l’avance Saint Épiphane dans sa 34e homélie. Nos ennemis remarquent encor que non seulement les plus anciens Pères ne citent jamais rien de nos Évangiles ; mais qu’ils rapportent plusieurs passages qui ne se trouvent que dans les Évangiles apocryphes rejetés du canon.