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{j28 la GUl-RRK CIVILE 1)L GENÈVE. [m^

Il est profond dans l'art de l'ergotisme; Kn (juatrc parts il vons coupe un sophisme, Prouve et réfute, et rit d'un ris malin De saint Thomas, de Paul, et de Calvin : Il ne fait pas grand usage des filles, Mais il les aime; il trouve toujours bon Que du plaisir on leur donne leçon Ouand elles sont honnêtes et gentilles; Permet qu'on change et de fille et d'amant, De vins, de mode, et de gouvernement.

(( Amis, dit-il, alors que nos pensées Sont au droit sens tout à fait opposées. Il est certain par le raisonnement Que le contraire est un bon jugement ; Et qui s'obstine à suivre ses visées Toujours du but s'écarte ouvertement. Pour être sage, il faut être inconstant; Qui toujours change une fois au moins trouve Ce qu'il cherchait, et la raison l'approuve : A ma déesse allez ofirir vos vœux ; Changez toujours, et vous serez heureux. »

Ce beau discours plut fort à la commune. (( Si les Romains adoraient la Fortune, Disait Grillet, on peut avec honneur Prier aussi l'Inconstance, sa sœur. » Un peuple entier suit avec allégresse Grillet, qui vole aux pieds de la déesse. On s'agenouille, on tourne à son autel, La déité, tournant comme eux sans cesse. Dicte en ces mots son arrêt solennel :

« Robert Covelle, allez trouver Jean-Jacques, Mon favori, qui devers Neuchàtel Par passe-temps fait aujourd'hui ses pâquesi.

L Jean- Jacques Rousseau communiait en cff> t alors dans le village de Moutier- Travcrs, diocèse de NeuchâteL II imprima une lettre dans laquelle il dit qu'il pleurait de joie à celte sainte cérémonie. Le lendemain, il écrivit une lettre san- glante contre le prédicant, qui l'avait, dit-il, très-mal communié; le surlendemain, il fut lapidé par les petits garçons, et ne communia plus. Il avait commencé par se faire papiste à 'lurin, puis il se refit calviniste à Genève; puis il alla à Paris faire des comédies; puis il écrivit à l'auteur qu'il le ferait poursuivre au consistoire de Genève, pour avoir fait jouer la comédie sur terre de France, dans son château à deux lieues de Genève; puis il écrivit contre M. d'Alembert en faveur des prédi- cants de Genève; puis il écrivit contre les prédicants de Genève, et imprima qu'ils

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