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L'Église a ses combats, la guorrc a ses intrigues :

Le mérite modeste est souvent obscurci ;

Le malbeur est partout, mais le bonbeur aussi.

Ce n'est point la grandeur, ce n'est point la bassesse,

Le bien, la pauvreté, l'ftge mûr, la jeunesse,

Qui fait ou rinlbrtnne ou la félicité.

Jadis le pauvre Irus, bonteux et rebuté. Contemplant de Crésus l'orgueilleuse opulence, Murmurait bautement contre la Providence : « Que d'bonneurs! disait-il, (|ue d'éclat! que de bien! Que Crésus est heureux! il a tout, et moi rien. » Comme il disait ces mots, une armée en furie Attaque en son palais le tyran de Carie : De ses vils courtisans il est abandonné ; Il fuit, on le poursuit ; il est pris, enchaîné ; On pille ses trésors, on ravit ses maîtresses. Il pleure : il aperçoit, au fort de ses détresses, Irus, le pauvre Irus, qui, parmi tant d'horreurs, Sans songer aux vaincus, boit avec les vainqueurs. a Jupiter! dit-il, ô sort inexorable! Irus est trop heureux, je suis seul misérable. » Ils se trompaient tous deux; et nous nous trompons tous. Ah ! du destin d'autrui ne soyons point jaloux ; Gardons-nous de l'éclat qu'un faux dehors imprime. Tous les cœurs sont cachés ; tout homme est un abîme. La joie est passagère, et le rire est trompeur'. Hélas! où donc chercher, où trouver l e bonh eur? En tous lieux, en tous temps, dans toute la nature. Nulle part tout entier, partout avec mesure, Et partout passager, hors dans son seul auteur. Il est semblable au feu dont la douce chaleur Dans chaque autre élément en secret s'insinue, Descend dans les rochers, s'élève dans la nue, Va rougir le corail dans le sable des mers, -Et vit dans les glaçons qu'ont durcis les hivers-.

Le ciel, en nous formant, mélangea notre vie De désirs, de dégoûts, de raison, de folie, De moments de plaisirs, et de jours de tourments :

1. Dans sou Précis de l'Ecclésiaste, Voltaire a dit:

Votre bruit m'impoitune, et le riie est trompeur.

2. Cette comparaison n'a rien de scientifique. ( G. A.)

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