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VARIANTES DU CHANT XVII. 283

Non loin du pont la i-cdoutablc Jeanne Caracolait noblement sur son ànc; Elle aperçut dessus ces bords fleuris, Vers la chapelle, à quelque quart de mille, j,„„— -Les_six çoursi.ers se suivant à la filej D'étonnement ses sens furent saisis. Jeanne bientôt s'étonna davantage Lorsque, voyant ces gens courir si bien. En un moment elle ne vit plus rien. Au coin d'un bois la main de la Nature

  • Teud sous leurs pieds un tapis de verdure,
  • Velours uni, semblable au pré fameux
  • 0ù s'exerçait la rapide Atalante.
  • Sur le duvet de cette herbe riante

Monrose vole, et de ses blonds cheveux L'air soulevait la parure ondoyante. Jeanne de l'œil le suit, et s'y complaît; Mais tout à coup Monrose disparaît. Le confesseur au même endroit arrive. Ciel! plus de prêtre et plus de Bonifoux. Tirconel vient, toujours plein de courroux. Jeanne portait une vue attentive Sur cet Anglais; l'Anglais s'évanouit A ses regards. La Trimouille le suit, La Trimouille est éclipse comme un autre. Quel sentiment, quel trouble était le vôtre, O Dorothée! Elle accourt, et soudain Elle est perdue, et l'œil la cherche en vain. Agnès se rend sur la place funeste, La belle Agnès y fond avec le reste. Tel dans Paris, près du Palais-Royal,

  • A l'opéra, souvent joué si mal,
  • Plus d'un héros à nos regards échappe,
  • Et dans l'enfer descend par une trappe.

Jeanne effarée, et se frottant les yeux, Priant Denis, et son âne, et les cioux, Crut être alors dans le pays du diable. Des enchanteurs, des larves, des sorciers, Pays si cher à nos bons devanciers, Que de Roland le chantre inimitable Chanta depuis dans son délire heureux; Que Torquato rendit encor fameux ; Que crut longtemps TÉglise charitable; Qu'ont suppose de graves parlements, Et des docteurs, et même des savants. Jeanne, piquant sa divine monture, La lance en main, se rend sur la verdure Où se passait cette étrange aventure. Mais c'est en vain que d'un double éperon Elle pressait le céleste grisou. Il s'arrêta vers la place fatale. D'un cou rétif, et rebelle au bridon, Se démenant d'une ardeur sans égale, Ruant, tournant, et fuyant ce gazon.

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