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Et l’inconstant Joyeuse[1], et saint-Paul, et Brissac.
Ils viennent : la fierté, la vengeance, la rage,
Le désespoir, l’orgueil, sont peints sur leur visage.
Quelques-uns en tremblant semblaient porter leurs pas,
Affaiblis par leur sang versé dans les combats ;
Mais ces mêmes combats, leur sang, et leurs blessures,
Les excitaient encore à venger leurs injures.
Tout auprès de Mayenne ils viennent se ranger ;
Tous, le fer dans les mains, jurent de le venger.
Telle au haut de l’Olympe, aux champs de Thessalie,
Des enfants de la terre on peint la troupe impie
Entassant des rochers, et menaçant les cieux,
Ivre du fol espoir de détrôner les dieux.
La Discorde à l’instant, entr’ouvrant une nue,
Sur un char lumineux se présente à leur vue :
« Courage ! leur dit-elle, on vient vous secourir ;
C’est maintenant, Français, qu’il faut vaincre ou mourir.
D’Aumale, le premier, se lève à ces paroles ;
Il court, il voit de loin les lances espagnoles :
« Le voilà, cria-t-il, le voilà, ce secours
Demandé si longtemps, et différé toujours :
Amis, enfin l’Autriche a secouru la France. »
Il dit. Mayenne alors vers les portes s’avance.
Le secours paraissait vers ces lieux révérés
Qu’aux tombes de nos rois la mort a consacrés.
Ce formidable amas d’armes étincelantes,
Cet or, ce fer brillant, ces lances éclatantes,
Ces casques, ces harnois, ce pompeux appareil,
Défiaient dans les champs les rayons du soleil :
Tout le peuple au-devant court en foule avec joie :
Ils bénissent le chef que Madrid leur envoie :
C’était le jeune Egmont[2], ce guerrier obstiné,

  1. Joyeuse est le même dont il est parlé au quatrième chant, note 1, page 108.

    Saint-Paul, soldat de fortune, fait maréchal par le même duc de Mayenne, homme emporté et d'une violence extrême. Il fut tué par le duc de Guise, fils du Balafré.

    Brissac s'était jeté dans le parti de la Ligue, par indignation contre Henri III, qui avait dit qu'il n'était bon ni sur terre ni sur mer. Il négocia depuis secrètement avec Henri IV, et lui ouvrit les portes de Paris, moyennant le bâton de maréchal de France. (Note de Voltaire, 1730.)
  2. Le comte d'Egmont, fils de Lamoral, comte d'Egmont, qui fut décapité à Bruxelles avec le prince de Horn, le 5 juin 1568.

    Le fils, étant resté dans le parti de Philippe II, roi d'Espagne, fut envoyé au