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À dévoiler leur sort ils pensent le forcer.
Le ciel, pour les punir, voulut les exaucer :
Il interrompt pour eux les lois de la nature :
De ces antres muets sort un triste murmure ;
Les éclairs, redoublés dans la profonde nuit,
Poussent un jour affreux qui renaît et qui fuit[1].
Au milieu de ces feux, Henri, brillant de gloire,
Apparaît à leurs yeux sur un char de victoire :
Des lauriers couronnaient son front noble et serein,
Et le sceptre des rois éclatait dans sa main.
L’air s’embrase a l’instant par les traits du tonnerre ;
L’autel, couvert de feux, tombe, et fuit sous la terre,
Et les Seize éperdus, l’Hébreu saisi d’horreur,
Vont cacher dans la nuit leur crime et leur terreur.
Ces tonnerres, ces feux, ce bruit épouvantable,
Annonçaient à Valois sa perte inévitable :
Dieu, du haut de son trône, avait compté ses jours ;
Il avait loin de lui retiré son secours :
La Mort impatiente attendait sa victime ;
Et, pour perdre Valois, Dieu permettait un crime.
Clément au camp royal a marché sans effroi.
Il arrive, il demande a parler à son roi ;
Il dit que, dans ces lieux amené par Dieu même,
Il y vient rétablir les droits du diadème,
Et révéler au roi des secrets importants.
On l’interroge, on doute, on l’observe longtemps ;
On craint sous cet habit un funeste mystère :
Il subit sans alarme un examen sévère ;
Il satisfait à tout avec simplicité ;
Chacun, dans ses discours, croit voir la vérité.
La garde aux yeux du roi le fait enfin paraître.
L’aspect du souverain n’étonna point ce traître.
D’un air humble et tranquille il fléchit les genoux :
Il observe à loisir la place de ses coups ;
Et le mensonge adroit, qui conduisait sa langue,

  1. Corneille, dans Horace, acte III, scène i, a dit :
    Pareille à ces éclairs qui, dans le fort des ombres,
    Poussent un jour qui fuit, et rend les nuits plus sombres.