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Il ôte aux nations le bandeau de l’erreur[1].
C’est lui qui, le premier, démasquant mon visage,
Vengea la vérité, dont j’empruntais l’image.
Que ne puis-je, ô Discorde ! ardente à te servir,
Le séduire lui-même, ou du moins le punir !
Allons, que tes flambeaux rallument mon tonnerre :
Commençons par la France à ravager la terre ;
Que le prince et l’État retombent dans nos fers. »
Elle dit, et soudain s’élance dans les airs.
Loin du faste de Rome, et des pompes mondaines,
Des temples consacrés aux vanités humaines,
Dont l’appareil superbe impose à l’univers,
L’humble Religion se cache en des déserts :
Elle y vit avec Dieu dans une paix profonde ;
Cependant que son nom, profané dans le monde,
Est le prétexte saint des fureurs des tyrans,
Le bandeau du vulgaire, et le mépris des grands.
Souffrir est son destin, bénir est son partage :
Elle prie en secret pour l’ingrat qui l’outrage ;
Sans ornement, sans art, belle de ses attraits,
Sa modeste beauté se dérobe à jamais
Aux hypocrites yeux de la foule importune
Qui court à ses autels adorer la Fortune[2].
Son âme pour Henri brillait d’un saint amour ;
Cette fille des cieux sait qu’elle doit un jour,
Vengeant de ses autels le culte légitime,
Adopter pour son fils ce héros magnanime :

    nos libertés contre les prétentions de la cour de Rome. (Note de Voltaire, 1730.) — En 1730, la note était plus ample; elle commençait ainsi : « On sait que. pendant les guerres du xiii e siècle entre les empereurs et les pontifes de Rome, Grégoire IX eut la hardiesse non-seulement d'excommunier l'empereur Frédéric II, mais encore d'offrir la couronne impériale à Robert, frère de saint Louis : le parlement de France assemblé répondit, au nom du roi, que ce n'était pas au pape à déposséder un souverain, ni au frère d'un roi de France à recevoir d'un pape une couronne sur laquelle ni lui ni le saint-père n'avaient aucun droit. En 1580, le parlement sédentaire donna, etc. » (B.)

  1. On a souvent appliqué ce vers à l'auteur de la Henriade, et M. Wirchter l'avait mis pour légende à la médaille qu'il a frappée. Cette médaille est fort rare, parce qu'à Genève on exigea de M. Wirchter de supprimer sa légende. (K.)

    — Le graveur que les éditeurs de Kehl appellent Wirchter est appelé Waechter par Colini. (B.)
  2. Boileau a dit, satire II, vers 66 :
    Je ne vais point au Louvre adorer la Fortune.