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OBSERVATIONS

SUR LE JULES CÉSAR DE SHAKESPEARE.

\ uilà tout ce qui regarde la conspiration contre César. On peut la comparer à celle de Cinna et d’Emilie contre Auguste, et mettre eu parallMe ce qu’on vient de lire avec le récit de Cinna et la délibération du second acte : on trouvera quelque différence entre ces deux ouvrages. Le reste de la pièce est une suite de la mort de César. On apporte son corps dans la place publique ; Brutus harangue le peuple ; Antoine le harangue à son tour ; il soulève le peuple contre les conjurés : et le comique est encore joint à la terreur dans ces scènes comme dans les autres. Mais il y a des beautés de tous les temps et de tous les lieux.

On voit ensuite Antoine, Octave et Lépide délibérer sur leur triumvirat et sur les proscriptions. De là on passe à Sardis sans aucun intervalle. Brutus et Cassius se querellent : Brutus reproche à Cassius qu’il vend tout pour de l’argent, et qu’il a drs dèmanfjcaisons dans les mains. On passe de Sardis enThessalie ; la bataille de Philippes se donne ; Cassius et Brutus se tuent l’un après l’autre.

On s’étonne qu’une nation célèbre par son génie et par ses succès dans les arts et dans les sciences puisse se plaire à tant d’irrégularités monstrueuses, et voie souvent encore avec plaisir, d’un côté. César s’exprimant quelquefois en héros, quelquefois en capitan de farce ; et de l’autre, des charpentiers, des savetiers, et des sénateurs mêmes, parlant comme on parle aux halles. Mais on sera moins surpris quand on saura que la plupart des pièces de Lope de Vega et de Calderon, en Espagne, sont dans le même goût. Nous donnerons la traduction de VlIcracUus de Calderon*, qu’on pourra comparer à VHcmdlus de Corneille : on y verra le même génie que dans Shakespeare, la même ignorance,

1 Voyez cette traduction de YHéracUm de Calderon.